Mon Petit Vieux

Mon Petit Vieux

« Quand on demande à quelqu’un comment il va, on prend de gros risques » disait Bébel dans mon film préféré de Lelouch, et pour cause !

En cette fin de journée mi-figue mi-raisin, le Zhom, Choupette et moi profitons d’une météo mitigée pour nettoyer un peu le jardin et nettoyer n’est pas un vain mot quand on sait que nous avons passé tous nos créneaux dispos à nous occuper de l’avancée des travaux en intérieur cette année …. Bref, nous nettoyons. Le Zhom taille la haie en extérieur, moi le buis et Choupette se bat avec quelques lianes de lierre récalcitrantes.

Et au loin, nous apercevons Claude, un voisin. Alors qu’il s’apprête à partir, il change d’idée et décide de venir discuter avec nous….

  • Bonjour Claude, comment allez-vous ? m’entends-je demander.

Comme je vous le disais, quand on demande à quelqu’un comment il va, on prend de gros risques.

Et Claude va mal, très mal, et à sa place, nous irions mal aussi.

Et Claude est seul, très seul, et à sa place, nous serions seuls aussi.

Et Claude nous raconte, avec difficulté, avec souffrance, son quotidien de veuf.

Parce que c’est ce qu’on dit veuf, quand vous perdez votre moitié. Et sa moitié à lui, c’était Odette, son Odette, emporté par un énième AVC l’hiver dernier…

Et chaque jour sans elle est une souffrance de chaque instant. Parce qu’il n’arrive toujours pas à y croire, parce qu’il ne s’habitue pas, parce qu’il n’y a plus personne pour faire « à bouffer » quand il travaille aux champs toute la matinée, parce qu’il n’y a plus personne pour lui rappeler de faire le plein à Carrefour quand c’est moins cher qu’Intermarché, parce qu’il n’a plus personne pour l’engueuler d’avoir encore trop « rangé », parce qu’elle n’est plus là, sa moitié. 60 ans que ces deux-là vivaient ensemble. Comme la maison est vide, comme le chemin restant est difficile…

Alors le Zhom et moi restons là. Nous l’écoutons nous raconter pour la énième fois comme son Odette était chouette, comme elle « gueulait » parfois mais comme ils s’aimaient ces deux-là.

Nous lui parlons de ses petites filles et là, on voit dans ses yeux le soleil, à nouveau qui brille. Oh pas longtemps, juste un instant mais comme on dit, tant qu’il y a de la vie….. Et justement, l’une d’entre elles arrive samedi 😊

Alors on lui sourit, on lui souhaite une bonne soirée, on lui dit à bientôt, et on se tourne le dos.

Et en rentrant, j’aime le Zhom et ma Choupette plus fort.

Et en rentrant, on trinque autour d’un bon verre de vin, histoire d’évacuer la peine et d’éloigner le mauvais sort.

Parce qu’il me touche, mon petit vieux. Et que oui, la vie, indéniablement, c’est mieux à deux !

 

Peps’Mozer (« Aimer, c’est se surpasser »)