La Guerre de Papy Ig’

Alors que cette année marque le centenaire de l’armistice, ce qui intéresse Choupette, c’est la guerre de Papy Ig’.

Papy Ig’ approche gentiment des 90 ans et s’il n’a pas été le père doux et aimant que mon père méritait ni le mari attentionné et tendre que ma mamie méritait, il n’en reste pas moins Papy Ig’, mon Papy Ig’ et aussi loin que je remonte dans mes souvenirs d’enfance, il a toujours été gentil avec moi, moi l’aînée de tous ces petits enfants, qui, aujourd’hui, n’en ont que faire de Papy Ig’…

Alors quand nous allons en Bretagne voir la famille, on fait un saut chez Papy Ig’.

Et quand Choupette le bombarde de questions (parfois gênantes pour nous adultes), il sourit et lui répond.

Et quand arrive sur la table le sujet de la  Guerre 39-45 qui intéresse ma fille au plus haut point, je le vois plonger dans ses souvenirs, nous quitter un instant, puis revenir…

  • Dis papy, t’as connu la guerre toi ?
  • Oh oui, ma fille !
  • Et c’était comment ta guerre papy ?
  • Et bah tu vois, avant à Brest, il y a avait plein de champs…..
  • Ah oui ?
  • Et oui, et quand les allemands sont entrés dans la ville, moi et mes copains, on les a vus et on était cachés dans un talus
  • Ah oui !
  • Et tu vois là, au coin de ma tête, c’est tout mou
  • Hein, hein
  • Et bien j’ai pris un éclat d’obus dans la tête qui est toujours resté.
  • Et on ne t’a pas opéré ?
  • Oh gast’ bah non, c’est resté comme ça !
  • Et tu t’es battu Papy ?
  • Oh non, j’étais trop jeune mais les allemands ont failli me tuer et m’ont pointé une mitraillette dans le dos.
  • Hein !?
  • Parce que mes parents m’avaient envoyé me cacher chez « René », tu te souviens de « René »

………. Non, Papy, elle ne peut pas se souvenir de René, elle a 7 ans et tu en avais 12 ou 14 à l’époque…

  • Ah oui, bah oui …. Donc les allemands ont débarqué chez « René » au cas où on cachait un anglais et n’ont trouvé personne mais s’ils avaient trouvé quelqu’un, ils nous auraient tous fusillés !
  • Et tu serais mort Papy !?
  • Et bah voui, mignonne !

…. Et ça continue comme ça un moment…

Et pendant ce temps autour de la vieille table du salon, le Zhom boit un « jus », comme dit Papy un mauvais café mais un café quand même. Et moi !? Moi, je regarde ma fille, des étoiles plein les yeux qui regarde mon papy, des souvenirs plein la tête

Et je me dis que la vie est bizarrement faite…. Cet homme si dur et violent avec les siens, souvent alcoolisé, qui, avec moi, a toujours été gentil, enfin je crois ; et qui aujourd’hui, parle, échange et rit avec ma fille, l’une de ses arrières petites filles….

Et quand il s’emballe dans une discussion nous disant « qu’on n’va pas se laisser emmerder par des p’tits cons »

Choupette glousse, fait mine de s’offusquer et lui répond : t’as dit des vilains mots Papy ! »

Et Papy de le réaliser, de lui sourire et de lui dire « Ah oui, Pardon ! »

Et moi, je souris, à mon Zhom, à ma fille, à Papy… Finalement à la vie……

 

Peps’Mozer (« Aimer, c’est se surpasser »)