Maman d’un préma…

A l’occasion de la Marche des Bébés organisée par l’association Prem’up (http://premup.org/fra) qui aura lieu ce dimanche à Paris, je partage avec vous une tranche de ma vie, la naissance de no3…

Il y a la vie d’avant, et celle après…

Il y a, avant, les longues soirées passées à regarder des émissions de télé sur les services de néonat, les accouchements, les grossesses d’autres femmes que l’on ne connaît pas…et il y a, après, le zapping quasi immédiat pour ne pas les voir, ni même les apervevoir…

Personne ne s’imagine devenir maman d’un prématuré ; on le devient comme ça, du jour au lendemain…des contractions trop fortes, une grossesse qui s’achève bien avant le terme, un si petit bébé qui arrive…

Un accouchement terrible, une énorme culpabilité , une douleur immense…

Et surtout…l’angoisse…

Mon fils est né à 35SA…le jour de mon anniversaire !

Beau cadeau…oui…mais si petit et si fragile… Tout de suite, j’ai fondu en larmes, à peine le temps de le serrer contre moi, on me l’enlevait déjà ! Je me suis retrouvée seule, mon ventre vide, j’avais froid, j’étais morte d’inquiétude, qu’allait on m’apprendre maintenant ?

Il n’est pas revenu…c’est moi qui suis allée le retrouver, affaiblie, poussée dans un fauteuil roulant, poussée par son Papa …je l’ai découvert, branché à des tuyaux, entouré des machines, dans une couveuse, comme un petit oiseau tombé trop tôt du nid, dans sa cage de verre.

Et c’est de ma faute mon bébé, de ma faute si tu es si petit, si faible…pourquoi ? comment en est-on arrivés là ?

Il a fallu la parole d’une soignante pour me ramener à la réalité, remonter la pente ; j’avais touché le fond, j’étais démoralisée, loin du bonheur d’une maman qui venait de donner la vie…et si mon bébé avait plutôt besoin d’une maman forte, positive, et courageuse ? A quoi cela servait de se lamenter ? Mon bébé était là, c’était comme ça, et c’est grâce à nous qu’il allait vivre !

Je me suis levée en pleine nuit, je l’ai rejoint dans son petit nid, je lui ai pris la main, je lui ai parlé, dit que je l’aimais, qu’il s’ensortirait…nous nous sommes assoupis, sa main minuscule dans la mienne, j’étais bien.

Le lendemain matin, il respirait seul ; le personnel m’a appris comment changer sa couche si petite à travers la paroi ; une main dans chaque fenêtre, je me sentais si maladroite, ses touts petits membres paraissaient si frêles ! on m’a expliqué à quoi servait les machines, j’ai appris à le rebrancher, à interpréter les signaux, à lire sur lesécrans…

J’ai compris que je pouvais poser toutes les questions que je voulais, que je ne passerais jamais pour une bécasse et que le personnel avait l’habitude !

Mon bébé était entouré d’une dizaine de copains nés trop tôt, comme lui, et ce fut aussi l’occasion de rencontrer leurs parents, de

partager des angoisses, d’avoir de l’espoir.

Je n’oublierai jamais le jour où deux jours après son arrivée, on m’a mis mon fils dans les bras en peau à peau…l’infirmière a pris la photo de cet instant magique…les mots manquent pour décrire ce moment…

Mon bébé n’était plus un numéro dans une couveuse, c’était mon bébé, celui que j’avais voulu que je tenais tout contre moi. Je voulais le nourrir, l’aimer pour que l’on sorte rapidement de ce lieu.

Le premier bain, le premier biberon, la première mise au sein, tout devenait magique et chaque jour notre fils nous montrait qu’il était un battant. Ensuite, j’ai pu le garder quelques heures d’abord, puis plus longuement dans ma chambre.

Tout n’a pas été facile, il a fallu beaucoup de courage à notre petite crevette pour petit à petit, respirer de façon autonome, apprendre à se nourrir…nous lui avons fait confiance, lui aussi.

J’ai découvert en moi des ressources insoupçonnées jusqu’alors…me lever à n’importe quelle heure de la nuit pour le nourrir, passer de longs moments à essayer de le nourrir, assister au moindre examen médical, brancher et débrancher mon fils…oui il m’a fait grandir !

Ce que je considérais comme un échec m’a permis de voir la vie plus belle encore, profiter de chaque instant m’émerveiller devant chacun de ses progrès…

Aujourd’hui, il a deux ans et est en pleine santé…

Au départ, je comptais quel âge il aurait eu s’il était né à terme, j’étais toujours en train de faire référence à sa prématurité…

Jai maintenant arrêté et c’est vrai que cela ne servait à rien !

Pas besoin de chercher à se culpabiliser en permanence, ni de trouver des réponses à des questions qui n’en ont pas…Il est né plus tôt, simplement, et aujourd’hui, c’est un beau petit bonhomme costaud et joufflu qui croque la vie à pleine dents.

Peut être même que sa naissance en avance lui a apporté des forces pour sa vie future.

Le séjour en néonat est plein d’angoisse et de douleur, mais il est également un moment privilégié pour découvrir son bébé, l’assister…entourés d’une équipe disponible et à l’écoute.

Personne ne s’imagine devenir maman d’un prématuré ; mais parfois il vaut mieux savoir que cela peut arriver !

Ce jour-là…Je suis devenue Maman d’un préma.