La dernière grossesse

Je n’aurai donc jamais réussi à aimer être enceinte.
Je garderai ce souvenir amusant de voir mon ventre s’arrondir.
Des coups de pieds d’un petit être.

Je me suis sentie étrangère à mes grossesses.
Je me regardais dans le miroir comme si je regardais une autre.
Je le savais.
J’étais prévenue.
Je l’ai ressenti trois fois.
Trois grossesses différentes avec des angoisses plus ou moins fortes.
Trois grossesses avec des sentiments amplifiés.
Des jours de grand bonheur et d’autres beaucoup plus gris.

Enceinte, j’étais comme prise en otage de mes angoisses.
Partager un corps c’est d’une grande violence.
C’est tout partager pendant neuf mois.
Tout transmettre.
Être à la hauteur du petit être.
Avoir cette folle responsabilité.

Et puis.

L’accouchement.
Comme une bouffée d’adrénaline.
La véritable naissance.
J’ai aimé si fort les premiers jours à la maternité.
J’ai aimé le retour à la maison, les premières fois, les premières découvertes, les sourires et la vie au ralenti.
Comme si le temps était suspendu.
C’est comme une renaissance à chaque fois.

Et puis.
C’était le moment où je récupérais mon corps.
Les angoisses devenaient nouvelles mais mon bébé était né.
Le premier mois de vie avec mon nouveau-né c’était un peu ma grossesse à moi.

J’aime tant ce premier mois.

Parfois je pense n’être pas faite pour avoir des enfants.
Je n’aime pas le reflet que je renvoie en tant que parent.
Parfois je me dis que c’est une évidence et que sans eux la vie est impensable.

Les sentiments ressentis en devenant parents sont assez fous.
Tout devient assez fou.
Toutes les limites sont repoussées.
La vie vibre plus fort.
L’amour devient viscéral.

La vie avec eux est une tempête heureuse.
J’ai hâte de les voir grandir encore.
J’ai hâte de voir quels adultes ils seront.

J’ai hâte qu’ils me racontent leur enfance.