Colères, caprices…une frustration nécessaire!

Il y a quelques semaines, j’ai eu l’occasion (et la chance) d’assister à une conférence traitant de l’opposition chez l’enfant…du caprice du tout petit à la colère de l’ado. Je te livre ici les informations données par la psychologue, mais également mon ressenti. En tant que professionnelle de l’éducation (je suis prof des écoles en maternelle), j’avoue que j’avais déjà quelques connaissances, mais les situations évoquées m’ont vraiment parlé (elle correspondent à des situations que je vis au quotidien). En tant que Maman, cela m’a bien sûr fait penser à plein de moments de notre vie de famille, mais surtout, elle cela m’a permis de déculpabiliser un peu. J’ai donc pensé que ça pouvait t’intéresser, toi le lecteur en tant que parent et j’espère que tu trouveras dans ce billet des clés pour mieux comprendre ton enfant et gérer les moments difficiles.

Commençons par une notre très positive…il faut savoir que la personnalité d’un individu ne s’achève qu’à sa majorité. Avant, il peut montrer certaines dérives, des tendances…Il faut bien sûr être attentifs aux éventuels signes qui pourraient annoncer un trouble, mais avant tout, il faut garder espoir! L’évolution d’un comportement est toujours possible, il y a toujours une marge de progression! Je trouve ce préambule très intéressant, il ne faut pas mettre d’étiquette, il ne faut jamais abandonner le combat…

Les enfants, dans leur évolution, connaissent des phases appelées ‘troubles des limites’ ; ce sont ces manifestations d’opposition que nous connaissons bien, et qui se traduisent par de la colère, et reflètent souvent une intolérance à la frustration. C’est tout à fait normal, car lié au développement psycho-affectif de chacun.

Si on y réfléchit bien, et qu’on commence par le début…

Dans le ventre de sa Maman, le bébé a tous ses besoins satisfaits…(chaleur, confort, nourriture). La naissance, le fait de quitter le ventre de sa mère représente la première frustration de sa vie ; désormais, il va devoir réclamer.

Dans ses premiers mois de vie, il reste relativement passif et ses besoins sont satisfaits immédiatement par ses parents. L’enfant est même décrit par Freud comme un ‘pervers polymorphe’ (il éprouve jouissance et plaisir). Il doit se manifester par les pleurs, les cris. Il devient un individu qui a besoin d’un autre pour satisfaire ses propres besoins.

Il existe ensuite plusieurs frustrations « naturelles » comme le sevrage (maintenant plus de biberon, on passe à la cuillère), la marche (l’enfant ne sera plus jamais porté comme avant…)

Vers l’âge de 2-3 ans, il traverse une période d’opposition que nous connaissons tous (âge du NON, Terrible Two…) Souvent cela tourne autour de la question de la propreté (et l’enfant sait très bien comment faire plaisir ou non à ses parents!!) L’enfant prend alors conscience de l’existence des autres, il manifeste son opposition par des caprices.

L’expérience de la frustration doit être précoce et progressive pour être structurante et constructive. Elle est nécessaire!

La frustration, c’est le manque fondateur de notre évolution ; on perd quelque chose pour en gagner une autre…donc, on grandit et on devient autonome. Ce sont ces manques fondateurs qui nous permettent d’avancer. D’ailleurs, on ne désire que ce qui nous manque ; on jouit de ce que l’on a. En tant que parents, nous devons donc apprendre à nos enfants à manquer, c’est notre rôle.

Si les parents culpabilisent de dire NON, il y a toujours la dérive de l’enfant roi, de l’enfant tyrannique. Si l‘enfant n’est pas confrontée à la frustration et il reste dans la toute-puissance bien après l’âge « normal ». Cela se manifeste souvent à l’adolescence par une flambée de toute puissance ; les parents, épuisés, finissent alors par céder.

Il faut en être conscient, plus on attend, plus il est difficile de fixer des limites.

Quand le parent culpabilise, il fatigue et finit par céder ; c’est dramatique pour les parents, pour l’ambiance familiale…et surtout pour l’enfant! Il devient tyrannique à l’extérieur car tyrannisé à l’intérieur par ses pulsions qu’il n’arrive pas à humaniser!

Car une pulsion (je veux quelque chose) on peut la dériver (je choisis autre chose) ou à la transformer en parole (j’aimerais vraiment avoir cette chose) ; on dit alors qu’on l’humanise et cela s’apprend. Les enfants rois, qui n’ont pas appris sont victimes, de leurs pulsions (je veux-je prends). Si on cède aux caprices, on entretient cette tyrannie (et on participe à la construction de comportements ou de personnalités psychopathiques). L’adulte qui se construit n’ira pas d’instance morale, il agit ses pulsions au lieu de les humaniser (je veux cette fille, je la prends, je veux ce scooter, je le vole…)

D’ailleurs, on remarque que chez les psychopathes, soit il n’y a jamais eu de frustration, soit elle a été trop précoce (abandon, pas de besoins primaires comblés…)

Mais avant de parler de l’adulte délinquant, il y a d’abord et déjà un enfant malheureux. S’il n’est pas frustré dans la famille, il va l’être à l’école, puis dans la société, et plus on attend, plus c’est violent (car ensuite, c’est la loi qui frustre (et ce n’est pas éducatif!) La frustration est nécessaire pour rencontrer l’autre ; dans la toute puissance, il n’y a pas de place pour l’autre.

Je dois dire qu’en petite section, je reçois dans ma classe de plus en plus d’enfants qui sont dans la toute-puissance, des parents qui n’en sont pas conscients, ont peur que leurs enfants ne les aiment plus s’ils les grondent… des enfants qui mènent toute la famille par le bout du nez, et des parents qui ont accepté la situation qu’ils trouvent finalement normale. On trouve derrière en cherchant un peu des parents en détresse, qui ne savent plus par où commencer pour redresser la barre et des enfants effrayés par le manque de limites. Il m’est arrivé de me faire frapper par des petits bouts de 3 ans, qui se roulent pas terre et me donnent des coups de pieds parce que je leur ai imposé quelque chose. Les parents doivent d’abord réaliser et accepter de comprendre que la situation n’est pas normale ; parfois ils ont besoin de l’aide d’un professionnel, mais souvent mettre (ou remettre) un cadre qui avait disparu est suffisant.

A l’école, pour accepter les règles et vivre avec les autres, la frustration est nécessaire. Ces troubles des limites peuvent se régler avec de la patience, de l’endurance, la collaboration des parents et la volonté que ça change (la situation s’arrange dans 90% des cas). Chacun doit retrouver sa place ; l’adulte fixe un cadre et des limites qui contiennent l’enfant. Il faut garder à l’esprit que le plus tôt c’est le mieux (il est plus facile de contraindre un enfant de 2-3 ans qu’un ado de 14 ou 15 ans!!)

Souvent les parents essaient de tout justifier, on peut le faire mais pas tout le temps ; il faut que l’enfant accepte que c’est comme ça.

J’avoue que cette soirée m’a fait beaucoup de bien. En ce moment, numéro 4 enchaine les caprices…des hurlements incessants, des « JE VEUX » hurlés quinze fois par jour. J’ai parfois du mal à supporter ses colères et je culpabilise de le punir, parfois de lui interdire, et je t’avoue qu’en fin de journée, ou quand ça arrive dans la voiture, je suis souvent tentée de lui dire oui pour que ça s’arrête! Que c’est dur! Il faut avouer qu’ils sont endurants ces petits loups, plus que nous souvent…mais je sais que si je cède une fois, j’ai perdu une grande partie du combat.

Quand je fais le bilan de ma journée, j’ai parfois du mal à trouver un moment sympa passé avec lui…et c’est difficile ; j’ai l’impression d’avoir passé mon temps à lui interdire, à la contraindre, à tenter de le faire obéir…J’ai essayé de négocier, de punir, et même menacer (oui je sais c’est mal, vous pouvez me jeter des pierres!)…Forcément, je me remets en question (je crois que ça fait partie de ma nature)…et à l’école c’est peu pareil avec certains élèves.

Du coup, entendre que la frustration est nécessaire, et qu’elle l’aide à se construire, que lui imposer des limites le rassure, que le cadre lui permet de se sentir en sécurité…ouf! Entendre que les erreurs font partie du métier de parent, que nul n’est irréprochable, punaise, que ça fait du bien!

Quand tu n’entends parler que de la discipline positive et que tu as tenté d’expliquer par douze mille façons pourquoi ci et pourquoi ça et qu’on te dit que non…ce n’est pas toujours pertinent et que c’est aussi positif parfois d’imposer dans discussion possible. Ouf!

J’ai vraiment apprécié cette soirée. On a pu poser quelques questions et la personne a répondu de façon constructive et bienveillante.

Voici les réponses qui m’ont le plus interpellée/intéressée….

-A propos de la punition : elle est nécessaire. La sanction par la privation n’est pas la meilleure ; elle est facile et coercitive. Si on opte pour la privation (puni de télé), elle doit être limité dans le temps, avoir un début et une fin (on ne prix pas un enfant d’un jouet pendant des mois sous la colère car on sait très bien qu’on ne tiendra pas et on perd alors toute crédibilité). Avec un peu de patience et de créativité, la punition réparation est plus efficace ; on demande à l’enfant de réparer sa bêtise (par exemple en nettoyant la peinture qu’il a mise par terre mais on peut aussi lui demander quelque chose qui n’a pas de lien avec l’infraction commise ; « que peux tu faire de bien pour tout le monde? ». Je demande parfois à mes enfants de « choisir » une punition ; ils sont souvent extrêmement sévères pour eux mêmes, c’est impressionnant! J’ai essayé à l’école avec deux enfants qui avaient gaché un temps de lecture ; l’un a choisi de m’aider à remettre la classe en ordre après les ateliers, l’autre a proposé de nettoyer le terrarium des escargots. Et en les voyant faire j’ai compris qu’ils avaient réellement eu l’impression de réparer leur mauvais comportement en agissant pour tous les enfants de la classe (bien plus qu’en étant resté assis sur une chaise).

-Que faire quand l’enfant est opposant? Il faut le faire céder, le contraindre, quitte à le faire physiquement. On peut aussi l’isoler (dans sa chambre par exemple) et lui demander de revenir quand il aura décidé de s’excuser (là aussi, le fait de le sortir du groupe/de la famille marche très bien chez nous comme à l’école). Cela lui permet de se calmer (on n’a pas envie de discuter quand on est en colère), de réfléchir à son comportement. On ne reprend les choses qu’ensuite, une fois qu’il est calmé et prêt à entendre et à dire les choses ; s’il n’en est pas capable, on peut lui proposer des choses (tu as tapé parce que tu étais en colère? tu étais triste?) La communication ne peut pas intervenir pendant la phase de colère ; elle doit intervenir ensuite.

Tout interdire au motif qu’on a peur pour l’enfant n’est pas positif. C’est d’autant plus vrai pour les ados qui apprennent par l’épreuve. L’ado prend systématiquement à un moment le contrario de ses parents ; il a besoin de dépasser les limites (si on interdit tout, il va chercher la surenchère). Il faut apprendre à faire confiance, ne serait-ce que pour donner à l’enfant une bonne image de lui même (ne pas dire… ne saute pas, tu vas tomber). Et pour cela, il ne fait pas se priver de lui dire des compliments (bravo, tu as sauté et tu n’es pas tombé! Tu grandis!!)

J’ai été ravie de vous faire ce petit compte-rendu mais surtout contente d’assister a1 cette conférence. A l’avenir, j’aimerais pouvoir participer à plus d’événements de ce type. Je crois qu’en tant que parents, nous connaissons tous et toutes des phases de doutes, de remises en question…quand les enfants font des crises répétées et que le bras de fer est engagé…Se dire qu’on n’y est pour rien, que cela fait partie du développement normal, comprendre que notre rôle est justement de les frustrer, réaliser qu’on n’est pas tout seul à rencontrer ces soucis…Ca fait drôlement du bien!!

ET toi?? tu connais ces crises? comment réagis-tu?

Viens me dire si l’article te parle, te plait…

PS : bien sûr, certains parents/enfants auront besoin de l’aide d’un professionnel

PS 2 : j’aime beaucoup cette photo prise lors d’une de nos ballades en vacances…pour une fois j’assume à peu près mon image (oui de dos mais c’est déjà un progrès!)